L’Origine de la Poudrerie se situe dans le contexte d’une longue guerre,. Le ravitaillement en « munitions » devenait important sur un front aux dimensions imposantes. L’ingénieur militaire Prangey est alors chargé de construire une fabrique de coton-poudre susceptible de produire 60 tonnes de produit par jour. Une décision ministérielle de l’Armement avait prévu, le 1er novembre1915, cette construction à Nantes. L’ingénieur chargé de sa réalisation ne se limite pas à Nantes, et il visite 11 emplacements » possibles » et c’est finalement celui de Bergerac qui fût choisi. La municipalité de Bergerac en est avisée le 4 décembre 1915.
Le « journal de Bergerac » qui annonçait alors la bonne nouvelle, remercie Albert Claveille qui est directeur des Chemins de Fer de l’Etat et secrétaire d’Etat à l’artillerie et aux munitions. Certes l’avantage du site est reconnu mais le journal privilégie l’influence politique dans un article intitulé : » Monsieur Claveille n’a pas oublié son pays natal « .
Albert Claveille est né à Mouleydier le 1er janvier1865, il en a été le maire. il repose dans le cimetière de Saint Cybard commune de Mouleydier. La rue après l’hôpital en direction de Liorac porte son nom. La ville de Bergerac lui a élevé une statue de bronze place de la République. Cette statue a été volée par les allemands en1941 pour fabriquer des canons, et une nouvelle mouture a été refondue en 1952 par les établissements LINARES.
Mais le site de Bergerac fut choisi pour plusieurs raisons :
La vallée de la Dordogne offrait un vaste espace plat et il ne fallait pas moins de 60 hectares.
-Le fleuve Dordogne tout près permettait l’alimentation en eau en très grande quantité.
-Le raccordement au réseau de chemin de fer était parfaitement réalisable, l’axe ferroviaire Bordeaux-Sarlat ne passait qu’à quelques petits kilomètres.
-L’usine hydro-électrique de Tuilières était apte à fournir le courant en quantité nécessaire.
Un courrier daté du 12 décembre 1915, publié dans plusieurs journaux précisait: La ligne électrique posée sur pylônes métalliques sera établie sur la rive gauche de la Dordogne et traversera les communes de Saint Agne, Saint Germain et Mons et Cours de Pile. Les propriétaires des terrains traversés sont priés de faciliter ces opérations. De plus, ils seront indemnisés pour le passage de cette ligne et pour les dégâts causés aux cultures. La nature du sous-sol composée de sable et de gravier, non calcaire, convenait parfaitement pour supporter des constructions importantes.
Un mois après le décret ministériel, un détachement de 1 000 hommes est sur le chantier où doit être construite la poudrerie. Le journal « l’Indépendant » signale en 1915 l’arrivée en gare de Bergerac de 15 000 wagons pour le transport du matériel et des matériaux sur le chantier. Le 7 janvier 1916, 500 prisonniers allemands viennent « rejoindre » les 300 déjà travaillant sur le site. Ils sont logés à l’ancien séminaire. Cochinchinois, Algériens, Kabiles, Annamites cohabitent et les relations sont souvent tendues. Le journal de l’époque mentionne l’accroissement des délits en raison de l’augmentation des effectifs de la Poudrerie. Les rubriques de faits divers annoncent des condamnations, des arrestations et dénoncent un climat d’insécurité régnant en ville..
Dès 1916, la population bergeracoise augmente des 5 000 emplois créés à l’usine militaire. A partir de cette date, la population employée devient de plus en plus importante. De 10 200 en 1917, elle atteint le nombre de 25 000 employés lors de l’Armistice en 1918. La population de la Poudrerie dépasse celle de la ville de Bergerac. Le nombre de naissances est doublé (de 200 en 1913, il passe à 400 en 1918). Mais la mortalité augmente et passe de 1,90 % en 1913 à 2,7 % en 1918 pour augmenter en 1918 suite à l’épidémie de grippe. Les besoins en nourriture et logements sont assurés par le milieu local. Des réfectoires sont aménagés sur place et les autorités militaires autorisent des ouvertures exceptionnelles de restaurateurs.
Le sport joue un rôle d’intégration. L’union sportive de la poudrerie organise des rencontres entre Annamites, Algériens et Français. Une association artistique est aussi créée, elle organisera des concerts et produira des pièces de théâtre. Ces associations existent encore aujourd’hui.
La guerre va bientôt prendre fin…Une fois la paix revenue, qu’allait-on faire de cette poudrerie ? Que vont devenir les 25.000 employés ? De ces problèmes vont naître deux évènements, la création d’un syndicat et l’apparition d’un mouvement de grève. Direction, salariés et politiques cherchent une solution…et la trouvent. La proposition de location faite par le ministre de la reconstruction industrielle est un succès. Dès le mois de septembre 1919, plusieurs candidatures se présentent. Une usine métallurgique, une société d’électro-céramique, une société de fabrication de pâte à papier, et la société de sucrerie de la Dordogne sont sur les rangs. Finalement, la poudrerie sera rattachée fin 1919 à celle de Saint Médard en Jalles (33) mais en ralentissant son activité.
La grande sècheresse de 1928 ayant provoqué l’évaporation des étangs sous lesquels les poudres étaient stockées une formidable explosion a fait trembler la terre Bergeracoise, un incendie dont on sentait la chaleurs à plusieurs kilomètres a bien failli se transmettre à l’atelier de fabrication des poudres. Si ça avait été le cas, Bergerac aurait été totalement détruite.
Quand débuta la seconde guerre mondiale la Poudrerie reprit ses activités importantes en employant 12 000 personnes. Puis l’Établissement se mis également à fabriquer un produit à usage industriel. Cette double activité lui permis d’assurer les besoins de la Défense Nationale tout en ouvrant une voie sur l’industrie des produits chimiques et du cinéma.
A l’origine, baptisée la PNB (Poudrerie Nationale de Bergerac), elle devint en 1972, la SNPE (Société Nationale des Poudres et Explosifs) Aujourd’hui on lit sur les panneaux fixés sur les grilles du portail d’entrée: Eurenco (groupe SNPE). Bergerac NC (groupe SNPE), Durlin et Manuco.
(source: Bernard Barthoumieux)