L’absinthe

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L’absinthe ou la fée verte….

  Après lui avoir reconnu toutes les vertus, on l’accusa de tous les vices.
Vénérée pour ses qualités quasi divines, elle devint l’objet de toutes les haines et fut mise au ban de la société, … et le nectar devint sinistre poison. Quelle aventure que celle de ce petit arbrisseau, armoise des rocailles, dont l’histoire chemine du merveilleux au pire!
  Sa traversée de l’antiquité fut pavée d’éloges, puisqu’elle était symbole de santé. Pline chez les romains puis Hypocrate chez les grecs lui trouvaient des vertus pour le foie, l’estomac, les flatuosités et la digestion! A la fin du XVlllè siècle, juste après la révolution le docteur ORDINAIRE qui était inquiet de voir tomber les têtes, tenait à conserver la sienne. Il quitta rapidement la France pour s’installer en Suisse dans la célèbre région du « Val de Travers ». Il était à la fois apothicaire et médecin. Grâce aux secrets de fabrication d’une potion, célèbre dans la région, et vendue par les soeurs Henriot, il mit au point une liqueur destinée à soigner tous les maux: la liqueur d’absinthe.
  Comme il fallait s’y attendre, les malades prirent un réel plaisir à absorber ce médicament qui ne pouvait que plaire. Un médicament qui pesait ses 72 degrés d’alcool, quelle aubaine! Rapidement on prit l’habitude de consommer un petit verre d’absinthe pour se mettre en appétit et prévenir une digestion difficile. Point n’était besoin d’aller chercher le médecin pour obtenir cette miraculeuse potion. Rapidement le bouche à oreille lui fit franchir les frontières, et on la retrouva très vite dans les cafés Parisiens. Elle enthousiasmera les artistes. Pour la mettre en valeur on crééra un cérémonial de service et alors elle séduira les bourgeois. A Paris on use de tout…hélas on en abuse.
 

Pelles à absinthe

Muse des poêtes et des peintres, insolente et brumeuse inspiratrice du talent, n’est-ce pas un peu l’absinthe qui permit à Rimbault, Verlaine et Toulouse Lautrec d’exprimer leur génie ?
  Depuis 1805, Louis PERNOD avait décidé de commercialiser la liqueur d’absinthe. Pour ce faire, il créa une usine à Pontarlier dans le Doubs. Il fit fortune. Devant le succès du produit, des distilleries naquirent un peu partout en France, dans le Jura, la vallée du Rhône et dans l’Hérault. La vague de l’absinthe et de l’alcoolisme submerge ce XIXè siècle, le gouvernement s’émeut, les viticulteurs souffrent de la concurence, si bien qu’en 1915 le couperet tombe: La production et la consommation d’absinthe sont interdits sur tout le territoire Français. On trouve un coupable: la teneur en Thuyone.
 
  Pour la petite histoire, c’est Paul RICARD qui en 1951 relancera la mode d’un apéritif anisé n’exédant pas 45°, et revêtu du sceau de la légalité. Le succès sans égal de cet alcool provenait évidemment de son goût, mais plus encore du riruel qui l’entourait: depuis une carafe, ou mieux encore d’une fontaine, l’eau fraiche s’écoulait lentement dans le verre, comme on le fait aujourd’hui avec le pastis. Mais pour atténuer l’amertume de l’absinthe, le filet d’eau devait traverser un sucre posé sur une pelle, une cuillère ou une grille perforée.

cuillère à absinthe

  Que nous reste t’il, qui concerne l’absinthe, et qui puisse faire un sujet de collection? très peu de choses
parce que quatre vingts-dix ans nous séparent de l’interdiction fatale. Il existe toutefois encore quelques superbes fontaines de verre et d’étain que l’on installait sur la table, devant les consommateurs et qui distribuait, par deux ou quatre petits robinets, deux ou quatre filets d’eau qui humectaient les sucres et élaboraient la divine préparation. Elles sont introuvables. On trouve un peu plus facilement des affiches louant les vertus de la délicieuse potion. On peut encore trouver des étiquettes, des bouteilles et autres flacon, le plus souvent supports de la marque PERNOD. La détention de bouteilles pleines
est interdite.

grille à absinthe

En fouillant, il est possible de trouver une carte postale généralement satyrique;…
(ne la manquez-pas), qui raconte les méfaits de l’absinthe, et il existe encore quelques rares assiettes
à dessert, vantant celles-là, les vertus du merveilleux breuvage!

Pot à cuilères en étain

Enfin, et c’est heureux pour le collectionneur, on trouve encore des pelles, des grilles et des cuillères à absinthe.
Faites de métal et peu encombrantes, elles ont bien traversé le temps. En général, elles ont vécu une ou deux générations dans un fond de tiroir de cuisine, puis en sont ressorties sous l’oeil circonspect d’une cuisinière qui se demandait bien quelle sauce on pouvait touiller avec une telle cuillère !!!
  La collection est tout à fait passionnante, parce que très diversifiée. Chacun y est allé de sa fabrication propre et de son originalité. Les limonadiers feront frapper de grandes séries de pelles, dans des métaux ordinaires, perforées aux lettres de leur nom PERNOD -BERGER -CIOR etc pour les offrir à leurs bons clients. Les orfèvres apporteront leur travail artistique, en modifiant la forme générale, comme la disposition et la forme des trous. Il en résultera un travail plus soigné, réalisé dans un matériau plus noble. 
  On rencontre très rarement le vermeil ou !’argent massif, mais très couramment le métal argenté. La pelle à absinthe est plate pour recevoir le morceau de sucre bien à plat. Parmi les classiques on trouve aussi une représentation de la tour Eiffel et diverses feuilles dont la courante feuille de chêne. (Attention à ne pas mèler à votre collection une cuillère saupoudreuse, beaucoup plus concave, et destinée à disperser le sucre en poudre. Attention aussi aux cuillères passe-thé, la confusion est courante.
Les cuillères, elles, ont été fabriquées dans les mêmes métaux, mais elles ont une conformation très différente.
Je n’en connais pas qui soit un support publicitaire. Pour servir l’absinthe, la cuillère est disposée à plat et à l’envers sur le verre. La grille qui doit retenir le sucre pout le filtrer, fait partie intégrante du manche. C’est souvent ce manche lui même qui est écrasé décoré et découpé de jolie façon. Les grilles devraient se rencontrer très facilement, car elles étaient d’un prix de revient plus faible, et parfaitement fonctionnelles. C’est pourtant elles que l’on trouve le plus rarement. Principalement parce que ca ne ressemble pas à grand chose, qu’on ne leur a trouvé aucune utilisation, et qu’on les a jetées.
  Paradoxalement, on les trouve rarement dans un mauvais métal, et un peu plus facilement en métal argenté ou en argent.

  Au cours de vos balades en brocantes vous pourrez encore rencontrer des cendriers, des pichets, des pyrogènes, des plaques émaillées et des affiches de belle qualité, nous sommes à l’époque des dessinateurs et des affichistes.
 Vous le savez, aucun interdit n’arrête le collectionneur.
Bien que la consommation de l’absinthe soit prohibée,
rien ni personne ne nous privera du plaisir de collectionner ses souvenirs tout en dégustant une anisette.
(source J.P.Noldin P.Masson)

 Avec l’union Européenne, les choses ont changé !
Un collectionneur nous informe de la nouvelle législation concernant l’absinthe.

  En 1981, le Conseil de l’Europe légifère sur les matières aromatisantes destinées à l’alimentation. Il les passe en revue, en fixant des taux maxima.
  C’est ainsi qu’elle en vient naturellement à la thuyone dont le taux limite  est fixé 35 mg/l pour la catégorie des « amers ».
  En choisissant ce taux maximum, le Conseil de l’Europe n’a pas songé un instant qu’il venait d’autoriser la   production d’absinthes identiques aux anciennes, puisque toutes les analyses réalisées sur des absinthes de toutes époques situent ce taux de thuyone entre 16 et 25%. Comment, à la lumière de ces informations, continuer à croire que l’absinthe fut pendant son heure de gloire un poison bourré de thuyone ?
  La vérité est toute autre, simple, pleine de bon sens : l’absinthe était un apéritif de plantes dont la seule nocivité résidait… dans l’alcool, présent jusqu’à 74%, qui déchaîna l’alcoolisme et les terribles maux qui l’accompagnent : délirium tremens, déchéance, ruine.
Visitez le site de ce collectionneur:
http://perso.numericable.fr/~lcolletaz/index.html